Midi Bascule

S3E32 Chronique d'Olivier - C’est votre dernier mot, Manu?

Mettre un point final n’est jamais chose aisée. Surtout à l’article de la mort. Et si on dissolvait la Faucheuse?

Marie-Eve: En ce jour d’inventaire avant liquidation, le fan-club d’un de nos chroniqueurs, composé de son papa, de Mme Columbo et de ses gosses, aurait été déconfit de ne pas l’entendre une dernière fois dans ses œuvres. C’est pourquoi on lui passe le crachoir, à toi Olivier, mais n’en mets pas partout, merci de laisser cet endroit aussi propre que tu l’as trouvé en arrivant.

Promis Marie-Eve, je ferai un coup de poutse et j’éteindrai les lumières en sortant. Chuis un homme moderne moi, le partage des tâches et de la charge mentale, je suis super pour.

M.-E.: Mouais, admettons. Et de quoi vas-tu nous parler?

De la difficulté qu’il y a à mettre un point final. Ça sonne sérieux, hein? Limite sinistre... On jurerait que je vais causer... je ne sais pas... de la cravate de Gérard de Nerval, tiens. Qui lui a servi à se pendre à une grille, rue de la Vieille-Lanterne, par une froide nuit de janvier 1855. Mais qu’on se rassure, ce n’est pas mon genre de verser dans les jérémiades et j’emmerde le nombrilisme splénétique de certains!

M.-E.: OK voilà, une grossièreté, ça c’est fait, et toutes nos excuses aux amateurs de Mozart pour cette collision sonore terrifiante.

Collision voulue, cela dit, car autant les procrastinateurs ont de la peine à commencer les choses, autant terminer, finir, conclure, ben c’est coton, en particulier quand tu t’apprêtes à clamser et que t’es un pipole: tu sais que tes dernières paroles risquent d’être consignées, de passer à la postérité, et si tu foires ta sortie, bonne chance pour rattraper le coup! Du coup, un chouïa d’humour, ça aide à faire passer la pilule.

Allez tout de suite un exemple très en phase avec le sujet du jour, qui met très judicieusement, comme nous l’avons fait plusieurs fois au cours des trois dernières années, les femmes à l’honneur. Connaissez-vous l’ultima verba, les derniers mots du dramaturge Scarron? Non? Voici: Je lègue tous mes biens à mon épouse, à condition qu’elle se remarie. Ainsi, il y aura tout de même un homme qui regrettera ma mort. Fin de citation.

M.-E.: Olivier, non, pas aujourd’hui!  

Ah oui mais c’est pas moi, c’est Scarron. Mais j’entends ton message et je veux bien être de bonne composition pour la dernière de Midi Bascule.

M.-E.: C’est une promesse ou une menace?

Un peu des deux, tu me connais. Pour montrer patte blanche, je vous propose un jeu, un petit quiz. Saurez-vous identifier l’auteur des dernières paroles que voici? Z’êtes prêts?

Première tentative: Pardonnez-moi, je ne l’ai pas fait exprès.
Alors, qui a dit ça juste avant de mourir? Eh non, ce sont les mots d’Emmanuel Macron, qu’il a prononcés juste avant de claquer d’un infarctus de l’ego après les élections européennes d’il y a deux semaines, quand il a constaté que sa promesse d’être le rempart contre l’extrême droite avait produit l’exact effet contraire! Bon, d’autres sources attribuent ces mots à Marie-Antoinette qui, conduite à l’échafaud, s’excusait auprès du bourreau de lui avoir marché sur le pied. Mais on sait quelle confiance on peut accorder aux historiens...

Bon, autre essai: Est-ce que personne ne comprend?
De qui est cet ultima verba? Toujours pas! Ce sont les dernières paroles d’un certain Macron Emmanuel, juste avant son décès par embolie de la décence, lui qui s’étonnait que le mépris dont il enrobait son peuple n’ait pas été pris pour ce qu’il était, une marque d’affection sincère. Pour d’autres, ces mots sont de Guy Parmelin, défuntant d’une overdose de chasselas lors d’une interview en anglais sur CNN. Pour d’autres encore, ils sont carrément de James Joyce, tout chafouin que son Ulysse ait causé quelques difficultés de compréhension aux lecteurs. Allez savoir...

Bon un dernier pour la route? T’inquiète, regarde: il n'est même pas chargé.
Alors, une idée? Vous n’allez pas le croire, mais ce sont les derniers mots d’un type connu sous le nom d’Emmanuel Macron, alias Jupiter, lâchés quelques secondes avant qu’il ne se tire une balle dans le pied en dissolvant l’Assemblée nationale après les européennes. D’où gangrène, septicémie, décès. Je sais, il y a des pinailleurs qui attribuent ces paroles à Terry Kath, membre fondateur du groupe de jazz/rock Chicago, juste avant de se tirer accidentellement une balle dans la tête en 1978. Eh bien qu’ils pinaillent tant qu’ils veulent, nous, nous sachons.

M.-E.: D’accord Olivier, je crois qu’on a compris l’idée. Pour une fois que tu ne t’en prends pas à Pierre Maudet, on ne va pas se plaindre. Maintenant, sans te mettre la pression, il est temps que tu nous les donnes, ton dernier mot, ta dernière chute de chroniqueur. Fais gaffe à ne pas te louper...

Oh les multiples derniers mots pathétiques de Manu me l’offrent sur un plateau, la conclusion. On ne devrait jamais avoir à terminer, à finir, à conclure. Mourir c’est nul. À l’instar de mes amis transhumanistes, je prononce donc officiellement, en ce 21 juin de l’an de grâce 2024, la dissolution de la mort. Qu’elle crève!

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Émission diffusée sur Radio Vostok en direct du Service de la culture de Meyrin, le 21 juin 2024
Publiée le 24 juin 2024

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