Midi Bascule

S3E32 Chronique de José - Dernières punchlines avant la tempête

Pour sa dernière chronique dans Midi Bascule, José Lillo fête dignement la fin de l’émission face à un monde basculant de plus en plus à l’extrême droite.

Salut à toi qui nous écoutes pour la dernière fois... Eh oui, après cette émission, figure-toi, nous allons nous aussi être dissous. Apparemment, on devait être une sorte d’annexe de l’Assemblée nationale... On a dû, malgré nous, contribuer à rendre la France ingouvernable ou un truc du genre, j’sais pas. Les chroniques fémino-islamo-gauchistes de Candice, c’était trop pour la Macronie, la verve à la sulfateuse d’Olivier et sa croisade technophobe nous ont coûté nos places, Marie-Eve, faut regarder la vérité en face.

On avait beau tout faire toi et moi pour ramener de la concorde, de la joie, surtout toi, de la confiance en l’avenir, surtout moi avec mes chroniques écologistes, nos efforts n’auront pas suffi, Marie-Eve. L’extrême gauche ici présente a tout fait foirer. En tout cas, la grenade dégoupillée ne nous a pas ratés... C’est le Guernica du service public à Genève Inter ou alors, soyons réalistes, c’est qu’il est temps de laisser la place, comme un peu tout, un peu partout, de plus en plus, à des choses qu’on n’a pas encore essayées.

Enfin, en politique, pas depuis 1933 en Allemagne, 1940 en France, 1922 en Italie, 1939 en Espagne, 1973 au Chili, 2023 en Argentine, 1998 en Hongrie, 2022 en Italie de nouveau, automne 2024 à tous les coups encore aux États-Unis... Pour la Russie, bon, pour la Russie on ne compte même plus, et j’en passe, et pas qu’un peu. En fait, le truc qu’on n’a pas encore essayé, on n’arrête pas de l’essayer, j’me rends compte, c’est quand même assez insistant comme phénomène dans l’Histoire, avec des variables d’ajustement selon les époques...

Alors on va dire que, pour l’instant, quelques autres n’ont pas essayé, ou alors pas depuis un certain temps, mais en Suisse - c’est vrai ça, parlons de nous un peu, ne soyons pas modestes, arrêtons avec la discrétion - en Suisse, ça domine au National depuis un moment et avec une majorité nette actuelle à 27,3%. Mais sans qu’on panique comme nos voisins au moment des résultats du scrutin. Nous, c’est la classe, c’est le fair-play démocratique, c’est la foi dans nos institutions. Quand tu vois le bordel électoral de feu que ça leur a mis dans le pays un RN à 31%. Mais eh! 31%, c’est à peine un petit 3.7 de plus qu’en Suisse les gens. Et ils sont là: Front Populaire! Front Républicain! No pasarán! Les mânes de Léon Blum! Tout le monde dans la rue! La jeunesse emmerde, tout ça. Nous, si on descend en masse dans la rue, à l’exception des mouvements féministes qui sauvent l’honneur, c’est parce qu’il y a l’Euro et c’est pour crier Hop Suisse! Là, nous, en Suisse, on est au paroxysme de la cause commune... Oh, écoute, on est un petit pays, on a les émotions politiques collectives qu’on peut...

D’ailleurs, pas d’amalgames, la situation n’est pas comparable avec la France. Et je le prouve: quand on demande récemment à l’UDC si elle est un parti d’extrême droite, elle admet qu’elle est peut-être xénophobe, oui, mais pas raciste... En Suisse, avant tout, on est honnêtes. On ne tord pas le cerveau des gens, on clarifie. L’égalité a beau être inscrite dans les constitutions, ça n’a jamais été vraiment pris au sérieux, je veux dire à la lettre. À part par les minorités tatillonnes, comme on dit. Les autres s’accommodant très bien du darwinisme social et nationalisme ambiant.

Allez, la petite touche d’espoir, en ces temps de confusion, elle nous vient des plateaux télé, oui, oui, où de toute évidence personne n’aurait été nazi en 39-45, même pas le RN, nooooon! Ils n’auraient jamais laissé faire ça les honnêtes gens, les crimes contre l’humanité c’est leur grande cause, les discriminations ça leur tord le bide, les populations qui fuient la guerre et les exterminations, ils leur ouvrent les frontières, ils leur offrent l’abri, mémoire oblige, l’État policier c’est leur plus grande angoisse, ils ont le respect de l’expression démocratique viscéralement chevillée au corps, le souci de la redistribution économique et le respect sacré de la nature. Leurs seuls ennemis, ce sont ceux qui n’en croient pas un mot. Comme par exemple Midi Bascule.

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Émission diffusée sur Radio Vostok en direct du Service de la culture de Meyrin, le 21 juin 2024
Publiée le 24 juin 2024
Crédits photo: Anne Bouchard

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