Marie-Eve : Halloween, c’est passé, mais quand il s’agit d’entendre des horreurs, avec toi Olivier c’est Halloween toute l’année. D’ailleurs vu le sujet du jour, je ne crois pas trop m’aventurer en disant que ta chronique sera comme un slasher movie bien gore : interdite aux moins de 18 ans. J’ai tout bon ?
Mais quelle clairvoyance Marie-Eve, c’est quoi qui t’a mise sur la piste ? Le thème des poils ? Mon insistance un peu louche à chroniquer aujourd’hui ? Cela dit t’as raison, à une nuance près : je conseille d’éloigner en effet les jeunes oreilles, mais je suggère à toute personne âgée de 18 à 40 ans d’ouvrir toutes grandes ses portugaises. Il en va de la santé de nos concitoyens, de l’équilibre moral, de l’harmonie entre les bonobos sapiens sapiens et carrément de la survie d’une espèce animale injustement vilipendée.
M.-E. : Tout ça, carrément ? Et pourquoi cette tranche d’âge de 18-40, au fait ?
C’est tout simple : les plus de 40 ans sont, je pense, un poil plus épargnés par cette épidémie.
M.-E. : Une épidémie maintenant, on aura tout vu. Une épidémie de quoi au juste ? T’arrêtes de teaser, tu rentres dans le vif du sujet ?
Oh je ne tease pas, je me réfère simplement à ce document très officiel, oui, ça, cette brochure éditée par l’Office fédéral de la santé pileuse.
M.-E. : Rah mais ça n’existe pas Olivier !
Eh bien ça devrait ! Car ce rapport dresse un tableau glaçant de la situation. Premier constat : 113% des 18-40 ans pratiquent l’épilation intime. Et quand je parle d’épilation intime, faut s’entendre : il est question d’une éradication totale et régulière. Les gens de cette génération traitent leur pubis comme Gengis Khan traitait les cités qui résistaient : terre brûlée ! Tout doit disparaître ! Vive le lisse, vive le glabre, le pelé, le rasé, l’anéanti, vive la pureté induite par le feu du rasoir ou la cuisson de la cire dépilatoire !
M.-E. : Euh oui bon d’accord, mais chacun fait ce qu’il veut dans sa culotte, non ?
Ouiiii chacun fait fait fait ce qui lui plaît plaît plaît, mais chacun est bien neuneu et ferait bien de s’interroger : pourquoi, dans quel but et à quel prix ? D’abord sachez, Mâmes et Meûssieurs les adeptes du génital alopécique, que cette pratique, contrairement aux apparences, est anti-hygiénique et dommageable pour votre santé. En vous scalpant les génitoires, encore et encore, vous semez sur votre pubis tout plein de microcoupures qui sont autant d’invitations adressées aux IST et autres cochonneries : entrez les bactéries, bienvenue les mycoses, ici c’est open bar !
Ensuite, c’est quoi cette manie de répondre aux injonctions du modèle pornographique ? Ça va le chalet ? Oui c’est bien là, à partir des années 1990 grosso modo, qu’on a commencé à voir dans le X des abricots et des zobs dépourvus de poils. Sans blague, vous les gens qui faites partie de cette génération si chatouilleuse sur les questions d’inclusivité, de consentement, ça vous pose aucun problème d’adopter une mode issue du porno ? Z’avez perdu les poils ET la boule, ma parole !
Et c’est pas tout : on conspue très légitimement la pédophilie depuis quelques années. Personne ne semble percuter, mais faut quand même le dire : y'a comme un bug logique dans la matrice, ici. Haro sur les pédophiles, mais en même temps on se baise parmi avec des moules et des haricots débarrassés des caractères sexuels secondaires que sont les poils ? Avec des verges et des fentes de petit garçon et de petite fille, vraiment ? Mais enfin c’est insensé, prenez vos cachets, votre lithium, votre Xanax, je m’en cogne, mais réveillez-vous !
C’est encore plus risible pour les mecs, si on songe que règne depuis un bon moment le look hipster, avec la barbe de série. C’est comme si les poils pubiens avaient migré de l’appareil génital pour venir décorer le faciès de ces gars. Or, je dois le rappeler aux plus étourdis : on ne pénètre pas sa ou son partenaire sexuel la tête la première, c’est formellement déconseillé par la Faculté ! Comptez pas sur les pompiers pour venir vous désincarcérer si jamais vous tentez le coup !
M.-E. : Olivier, je suis… mortifiée.
Oui je comprends, tu dois avoir l’image en tête. Mais moi j’en ai deux autres. Celle d’un Gustave Courbet désespéré s’il avait dû peindre L’origine du monde aujourd’hui. Il voulait pas faire une planche anatomique, Gustave, il voulait célébrer la pilosité aromatique du désir… La seconde image, je la dédie aux Verts, qui se sont pris une sacrée rouste lors des dernières élections fédérales. Il est temps qu’ils se recentrent sur leur cœur de métier. Par exemple la défense des espèces menacées d’extinction. Et là, qui dira, en cette époque de haine du poil, l’agonie du morpion privé de son biotope ?
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Émission diffusée sur Radio Vostok en direct du Service de la culture de Meyrin, le 3 novembre 2023
Publiée le 6 novembre 2023
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